Comment je me suis réconciliée avec la cuisine française traditionnelle
En fait il s’agit plus que d’une réconciliation avec la cuisine française traditionnelle. C’est d’abord une reconnaissance.
Car, à tout vous dire, jusqu’à l’année 2019, j’étais carrément snob. Voire parfois un peu con.
Je ne jurais que par la cuisine anglaise, les gastropubs et les poitrine de porc rôti.
Rassurez-vous, je ne renie rien de tout ça, les spécialités d’outre-Manche sont encore parmi mes favorites.
Cependant avant, je me contrefichais de la cuisine française. Je la trouvais ennuyeuse, trop familière. Elle manquait d’exotisme, elle ne m’aidait pas à m’évader.
Pourtant, je n’avais rien contre une bonne choucroute ou un confit de canard. Mais c’est plutôt que je les mangeais quand il y en avait, au lieu d’aller exprès les chercher.
Le riz au lait au citron,
Chez mes parents, Figeac
L’aligot, les tomates du jardin, le rosbif
Chez mes parents, Figeac
La cuisine française et moi: c’était mal parti
Voyez-vous, mon principal grief contre la cuisine traditionnelle française, c’est le manque d’équilibre. Dans les brasseries des villes, toujours la grosse pièce de viande, les pommes de terre sautées ou frites. Pas de légumes ou si peu. Puis le sacro-saint rituel entrée–plat–dessert. Celui qui peut durer des heures à table lors des repas de famille.À transformer la joie de bien manger en une bataille contre son estomac. Ne plus avoir faim et avoir encore un plat qui arrive sur la table. Ne plus avoir soif et avoir encore son verre de vin rouge resservi.
Résister pour ne pas s’endormir, surtout si le repas se passe le soir, et que, comme moi, vous êtes une petite nature qui aime être en pyjama dès 21 heures.
Alors qu’à l’orientale, ce sont plein de petits plats. Des salades vibrantes, des crudités multicolores. Du punch. Des grillades, oui, mais équilibrées avec de l’acidité, du tranchant. C’est dynamique, les assiettes tournent sur la table, entre les convives.
Et pour en revenir à l’Angleterre, là vous pouvez très bien commander trois entrées, un plat et trois desserts. Faire ça comme il vous en chante, à votre sauce. Demander à tout mettre sur la table au milieu pour partager. Personne ne bronchera. C’est cette sensation de choix qui me manquait dans la cuisine française traditionnelle. L’idée des codes et des rituels qui ne se sont pas remis au goût du jour (et pourtant, d’habitude, j’adore vraiment ça les rituels).
Le restaurant
La Brasserie André, Lille
Redécouvrir la cuisine française grâce à des Anglais
Savez-vous comment la réconciliation s’est initiée ? Grâce à un chef britannique.
C’est Alex Jackson, du restaurant londonien Sardine, qui m’a remis le pied à l’étrier. Il est également auteur du livre de cuisine éponyme dédié à la cuisine française méditerranéenne.
Et là, on retrouve les spécialités de nos terroirs. De manière un petit peu plus contemporaine, mais avec un énorme respect et un amour du patrimoine gastronomique local.
J’ai souvent plein de théories sur tout, qui varient d’un mois à l’autre. Je n’ai donc pas de problème à dire d’énormes bêtises et à assumer totalement après.
C’est donc en préparant les mijotés provençaux de Monsieur Jackson que j’ai réalisé que j’avais très certainement manqué quelque chose.
Mon autre chef anglais préféré, Fergus Henderson, a lui aussi un vignoble dans le Languedoc, et est un amateur des tablées hexagonales.
Alors cela a commencé lentement. Lire les éditions voyages et gastronomie du Guardian avec leurs recommandations de bonnes tables en France. Passer autant de temps à chercher un petit bistrot dans mon propre pays que ce que j’aurais fait s’il s’agissait d’une destination lointaine.
Ritualiser le déjeuner du dimanche à la maison. En se focalisant sur les plats conviviaux. Pot-au-feu, couscous (le plat préféré des Français, c’est permis, surtout quand la recette est de mes parents pieds-noirs), haricots et autres ragoûts.
Le tartare,
Brasserie André, Lille
Les oeufs en meurette,
Restaurant Daniel & Denise, Joseph Viola, Lyon
Le grondin, Restaurant St. John, Fergus Henderson, Londres
Un matin, j’ai décidé que j’avais eu tort
J’allais donc chercher toutes les preuves que la cuisine traditionnelle française, c’était vraiment sympa.
Depuis, j’ai redécouvert avec plaisir les bistrots de quartier. Les services gouailleurs qu’on croirait sortis de cartes postales. Les apéritifs à l’ancienne, la gentiane, le Salers. Plus c’est vieillot, plus ça me plaît.
J’ai l’impression de me plonger dans une époque révolue, où chacun cuisinerait en fonction de ce qu’il a dans son jardin, des recommandations du boucher ou du poissonnier du coin.
Le repas lyonnais, sabodet – pommes de terre – salade de lentilles
Chez nous, Lille
Le pot-au-feu pied-noir
Chez nous, Lille
Se délecter par anticipation
Lors de notre tour de France à bicyclette, je me délecte d’avance à l’idée des galettes bretonnes, de la bouillabaisse de Marseille. Des menus de restaurants routiers au bord de nationales ou départementales. Des îles flottantes, des tartes aux pralines et globalement, de toutes les spécialités qui viennent de Lyon (oh oui, encore des œufs meurette!).
Prendre son café au bistrot du coin. Écouter les piliers de comptoir discuter. Participer. Ou pas. Regarder ces scènes de la vie quotidienne avec douceur, sans jugement. Essayer d’être un touriste dans son propre pays. Observer les habitudes de ses semblables avec candeur, comme si c’était la première fois.
Après plusieurs semaines de confinement, il est certain que le bonheur de trinquer et casser la croûte ensemble sera encore plus grand. Nous avons hâte de vous retrouver en chair et en os !
L’oeuf à la coque, petit-déjeuner à La Grenouillère
Alexandre Gauthier, La Madelaine-sous-Montreuil
Les charcuteries,
L’Auberge de Laparrot, Corn
Les crêpes au jambon, fromage et béchamel,
Boucherie Teirlinck, Lille
Recevez en cadeau «Les repas du dimanche»
🌍 Une thématique par plat pour voyager tous les dimanches
🙂 De la cuisine généreuse, faite pour être partagée
👍 La Carte Postale hebdomadaire